La fauconnerie, ou comment chasser à l’aide d’un rapace !

Publié le 16 juillet 2017
Auteur Vincent Piednoir
Vraisemblablement apparu sur les hauts plateaux D’Asie centrale il y a 4000 ans, l’art de la fauconnerie (ou de la chasse au vol) consiste à capturer un gibier naturel dans son environnement au moyen d’un rapace affaité (c’est-à-dire dressé) à cette fin. D’un point de vue historique, on estime que les Kirghizes, chasseurs nomades, furent les premiers fauconniers, et que, si les Anciens Grecs et Latins semblent avoir peu goûté cet art, celui-ci a progressivement conquis les mondes arabe, celte et gaulois puis l’occident au fil des siècles – jusqu’au Moyen Age, qui sera l’époque de l’apogée de la chasse au vol en Europe, et singulièrement en France.

Evolution

Dans ce pays, la fauconnerie fut longtemps associée à la noblesse et à l’exercice du pouvoir royal, en particulier sous le règne de Louis XIII, lequel, passionné par ce déduit, possédait en 1616 pas moins de six équipages spécialisés – soit l’équivalent de 300 oiseaux !

A partir de Louis XIV, cependant, la vénerie et le développement des armes à feu altérèrent sensiblement l’intérêt pour la fauconnerie – qui fut même interdite, suite à la Révolution, en vertu de sa charge symbolique. Il faudra attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour que renaisse véritablement la chasse au vol en France, et pour qu’elle soit officiellement reconnue par la loi (en 1954), grâce aux efforts de l’Association Nationale des Fauconniers et Autoursiers Français (ANFA), fondée quelques années auparavant par Abel Boyer.

Aujourd’hui, la fauconnerie est pratiquée dans de nombreuses régions du monde (Russie, Japon, Moyen-Orient, etc.) – y compris aux Etats-Unis, où elle ne revêt pourtant pas le caractère d’une tradition ancestrale. De fait, en 1968, plusieurs associations européennes ont créé l’International Association for Falconry and Conservation of Birds of Prey (IAF) : présente dans 48 pays, celle-ci défend et fait connaître la passion des quelque 10 000 fauconniers qui la constituent… Avec efficacité, du reste, car la fauconnerie a été, en 2010, inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco !

Bas-vol

Sans entrer dans les subtilités de ce qui est en soi une véritable science, on distingue principalement en fauconnerie deux techniques, fondées chacune sur la morphologie du rapace utilisé et sur ses méthodes de chasse propres.

Le bas-vol, qu’on appelle aussi autourserie, consiste à chasser devant soi, l’oiseau posé sur son poing, et le plus souvent avec un chien (pointer, braque, épagneul, etc.). Quand le gibier est levé ou arrêté, l’oiseau est lancé à sa poursuite et fond sur lui afin de le saisir de ses puissantes serres (on dit alors qu’il le lie). Rapide, courte, cette poursuite n’excède pas quelques centaines de mètres et peut avoir lieu dans des espaces couverts, boisés par exemple. Le bas-vol est notamment pratiqué avec l’autour, l’épervier et la buse de Harris. Les proies potentielles sont le faisan, la perdrix, la caille, le lapin, le lièvre… Le chevreuil et le renard peuvent aussi être pris, en bas-vol, à l’aide de l’aigle royal.

Haut-vol

Plus spectaculaire encore, le haut-vol utilise uniquement le faucon (pèlerin, en particulier : il passe pour être l’oiseau le plus rapide du monde en piqué). Le principe ? Le fauconnier garde son oiseau au poing (chaperonné, pour éviter le stress) jusqu’à ce que son chien tombe en arrêt ; il déchaperonne alors le faucon et le met sur l’aile (le laisse s’envoler) ; ce dernier monte en carrières et tourne en cercle à une hauteur qui varie de 50 à 300 mètres ; puis soudain, quand le gibier se lève, il effectue un piqué vertigineux (de 200 à 300 km/h !) vers sa proie, provoquant ainsi un choc d’une violence inouïe et auquel le gibier a fort peu de chance de survivre (ce choc est appelé buffetage)… En général, le haut-vol nécessite de grands espaces, de vastes plaines et il ne se pratique, par essence, que sur la plume (faisan, perdrix, grouse, etc.).

La fauconnerie : un mode de vie à part entière…

Haut-vol ou bas-vol, la fauconnerie est, on l’imagine aisément, un vrai sacerdoce. Se procurer un oiseau est très réglementé (certains naissent en captivité ; pour d’autres – autours et éperviers –, il est possible de les prendre au nid sous couvert d’une autorisation ministérielle spécifique).

Ensuite, l’affaitage requiert du temps, beaucoup de patience et d’intelligence de l’oiseau – qui doit finir par avoir confiance en l’homme et en son chien (tous seront en effet amenés à travailler de concert !). La fréquence des vols (tous les jours si possible !) est essentielle ; et le fauconnier doit savoir entretenir la condition physique de son élève au plus juste : celui-ci doit avoir faim (pour sentir la nécessité d’attaquer), sans être faible (il serait alors inefficace).

Au reste, la fauconnerie nécessite des territoires giboyeux et donc particulièrement entretenus : impossible de dresser un tel animal là où les proies potentielles se font rares (hélas, c’est de plus en plus courant aujourd’hui sous nos latitudes !)… Enfin, ce mode de chasse lourd de contraintes (le rythme de l’oiseau devient le vôtre, et non l’inverse !) est fondé sur une éthique très rigoureuse et précise qui exclut – les fauconniers y tiennent ! – toute forme de dilettantisme et d’approximation à l’égard notamment des rapaces… Pas sérieux, donc, s’abstenir !

Pour en savoir plus sur cet art ancestral extraordinaire, consultez le site très bien réalisé de l’ANFA : www.anfa.net – et celui de l’IAF : www.iaf.org

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